Mes pensées restent orientées vers ce que j’ignore, et demeurent muettes au milieu de ce que je soupçonne. J’espère un moyen pour consigner quelque révélation. Celle-ci opère sans travail, sans effort. Elle viendra d’avoir maintenu cette vigilance aveugle, cette attente sans méthode, cette stase sans règles.
Je prends quelques notes de ou à propos de ceci. Ce pourrait être aussi bien « pour » ou « avec » ; peut-être la révélation se tient-elle, ou plutôt se fait au cours du temps infime de ce mot : « pour » , « avec » ou encore moins, « de », l’attributif de quelque chose, ou quelque chose de quelque chose. Ce presque rien est trace de cet accès de l’invu, du non su, de l’invécu qui entre dans la conscience. Peu suffit, et trop le tuerait.
Avec la part de soi, muette, invisible, rebelle à toute directive, mais opérante dans les détails cruciaux de la vie, quand elle paresse ou elle contemple. On doit faire le tour de soi avec des mots et des gestes qui jusque-là n‘ont pas été faits - pour pressentir cete part, la deviner, au moins se mettre en quête de son secret, et lui faire le chemin, lui entrouvrir la porte. Cette part fera trace et sens dans la parole, pour changer ce qui était devant nous, le transmuter en ce qu’il attendait d’être.