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RAPHAËL MONTICELLI

BOURAKMA Brahim, Sumer, terre et langue en moi

Pour Brahim Bourakma

Publication en ligne : 18 mars 2010
/ présentation d’exposition

Pour retrouver "Sumer, terre et langue en moi" dans " Les rossignols du crocheteur ", aller à : Les rossignols du crocheteur > BOURAKMA Brahim
Artiste(s) : Bourakma Ecrivain(s) : Monticelli R.

De mes deux mains formées en creuset ou en coupe, comme on le fait pour se désaltérer, je recueille assez de terre pour donner naissance à un fruit de la terre ou à un visage d’enfant.

 
Qu’est-ce qui t’attache à cette terre ? Qu’est-ce qui t’y rattache ?
 
Mes pères agenouillés au bord des veines d’argile, vous avez connu ce même vertige quand vous avez senti la terre docile conserver la moindre trace, sauvegarder la moindre empreinte, garder, fidèle, la forme que vos mains, agiles enfin de son agilité, avaient donnée à l’empan.
 
Quel lien subtil –fragile et précaire- te retient ici en t’entraînant là-bas ?
 
La terre sous vos doigts a pris toutes les formes, pierre parmi les pierres, arbres à jamais verdoyants et fleuris chargés de fruits, montagne de briques réunies au milieu des plaines, tour s’élevant par degré jusqu’aux abords du ciel.
 
Quelle voix double fait doublement vibrer ta gorge des musiques mêlées de deux langues ?
 
Vous lui avez donné la forme des bêtes familières, anges porteurs de force et de vie, et celle des fauves, dragons et chimères que vous avez postés devant les territoires du rêve.
 
Dis moi : « De quelle matière est faite ta matière ailée ? »
 
Vous lui avez donné jusqu’à la forme des dieux, devenus dieux entre vos mains audacieuses et dévotes, et vous les avez entourés de rites, et vous les avez chargés de chants.
 
Dis-moi quelle vie double te rattache à cette terre et, dans le même moment, t’en retranche ?
 
Comme une pâte de farine et d’eau mêlée, vous avez aplatie en galettes la terre argileuse et vous y avez gravé l’état de vos stocks, l’esprit de vos lois et l’image fossile de vos mots.
 
Dis-moi ce que tu as perdu.
 
Une lune, ou ce bout de ciel égaré dans nos têtes, trépane nos crânes. Pure absence, toute proche et intouchable, par laquelle passe le monde pour envahir nos crânes, par laquelle tout entiers nous passons pour envahir le monde, et toute notre ignorance -tout notre savoir- et toute notre mémoire -tout notre oubli- manque à nos doigts et nos crânes. Nous ne cessons de creuser, en voulant le combler, ce point aveugle par lequel nous (nous) regardons.
 
Je suis l’effigie incertaine de ce que tu as perdu.
 
Dans la nuit les ombres, dessinent la forme parfaite de nos rêves enfouis.

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