JEAN-MARIE BARNAUD
3Les lieux aussi sont corps mêlés
Misère et grandeur s’y accouplent
On reconnaît chacun à son ciel
comme il embrasse
comme il courbe et lisse ses teintes
Le temps alors
met sa tête sous son aile
vous confie au hasard
On a la bride sur le cou
On file ses rêves
On croirait
voyant autour de soi
des champs si propres
que ces courbes vous aiment
qu’elles prennent soin aussi
de l’âme
la font chanter
On abandonne les bois noirs
de la métaphysique
dès que s’éclairent ces contrées
On oublie la nuit griffue
la nuit des petits monstres
Secouez vos défroques
dit la raison raisonnable
dessillez-vous les yeux
Risquez-vous au corps des villes
plus vif que la bête incertaine
qui fait la roue
prend ses taches pour un monde
Recevez
de l’ordre des pierres
des rues des places
des jardins
où passent des formes de chair
et non des ombres
Recevez d’eux
réparation
Et donc voici la métropole
et moi
grossi des mots des livres
aspiré par les boulevards périphériques
et perdu comme un puceau
dans cette machinerie
dont autrefois la poésie
aima la faconde et l’ivresse
Plus tard
du pont sur l’eau
qu’ouvre le mufle des péniches
à nouveau la voix de la raison
qui aime
et dénoue l’embarras des paroles
En bas contre les pierres
où brise le courant lourd
que plombent les moires du fuel
à où s’est une fois abîmée
la chance du poème
humblement
après tant d’autres
j’apprends la patience
Comme la lumière persiste
enveloppant les volées d’immeubles
et de tours aux vitres aveugles
on dirait que ses jeux ont pouvoir
de tourner en élégance
la violence et la force
-
Ici
dit la raison
c’est peut-être encore la mer
la vie puissante
sa tendre indifférence
Passer est le lot le plus simple
Passer
et cependant rendre les armes
à la splendeur
Messages
1. Fragments d’un corps incertain, 8 août 2020, 08:06, par Alain Freixe
Oui, passer...et rien de plus. Juste pour le silence que l’on entend après le passage !
2. Fragments d’un corps incertain, 8 août 2020, 09:08, par Raphaël Monticelli
l’un des premiers textes publiés sur Bribes en ligne. Et fort ! "Les lieux aussi sont corps mêlés" !
3. Fragments d’un corps incertain, 10 août 2020, 14:31, par Jean-Marie Barnaud
Merci beaucoup, les amis. Attention à l’erreur sur"coup", qu’il faut lire "cou".
Je vous embrasse.
J.-M.
1. Fragments d’un corps incertain, 10 août 2020, 14:46, par Raphaël Monticelli
Je rectifie dans la foulée...