Dixième salut : Comme une troisième trace des viscères du dehors
Le lourd travail des meules produit des poudres qui, par leur densité, leurs couleurs, leur odeur et leur saveur, rappellent à la mémoire les grains, les feuilles, les fleurs, les cendres, les suies et les pierres d’où elles ont été tirées. Elles rendent aussi le souvenir de l’eau ou de l’air qui animaient les meules, celui du mouvement des axes qui, à l’image des gestes de nos bras, les mettent en rotation, celui des écrasements qui broient les matières entre les deux pierres, comme le pouce le fait des poussières de pastel entre la peau et le papier.
En attendant de retourner sans doute aux poussières dont nous rêvons d’avoir été tirés, nous en ornons nos vies que nous faisons flamboyer dans l’image somptueuse de notre propre disparition.
Et plus grande encore est notre ferveur à l’idée que nos petits espaces de poussières colorées naviguent au milieu de grands signes d’humidités perdues, comme vient le doute dans un geste de lutteur.