Troisième salut : comme une trace du magma du dehors
Le scribe ne retient qu’à peine l’envol de ses doigts, pétrissant en bout de plume ou de poils des humidités noires, grises ou bistres qu’il jette sur le papier en vitesses orageuses.
Les mots proférés vivent de l’air qui les porte, les mots écrits de l’eau qu’ils ensemencent ; le scribe, assis entre l’air et l’eau, sait qu’il n’est d’encre qu’à la limite du sens, là où la pensée, grise d’eau, hésite encore, s’ébroue ; qu’il n’est de trace qu’en fin d’assèchement, quand l’eau disparue aura permis aux poudres qu’elle porte de faire corps avec les surfaces qu’elle aura imbibées ; qu’il n’est d’écrit que des humidités perdues. Et que cette perte est douleur.
Sans doute est-ce pourquoi, il s’efforce d’assagir sa main et d’affermir ses traces, de faire taire le cri qui continuement vibre à l’intérieur de son corps, de laisser la pointe de ses doigts s’élever, souveraine, et qu’il rêve d’atteindre ainsi à ce qu’il croit être la sérénité du géographe.