RAPHAËL MONTICELLI
Galerie des Ponchettes, Nice, 1986
voir document expo Boltanski Lieu 5, 1979 ►
Avez-vous vu l’exposition « Boltanski » à la Galerie des Ponchettes à Nice ? Non ? Alors précipitez-vous, vous avez encore jusqu’au 11 mai pour voir une installation à mi-chemin entre la sculpture et le théâtre d’ombres, entre le très classique jeu des ombres chinoises et une subtile et très contemporaine interrogation sur l’art...
Boltanski a toujours mené sa recherche sur les illusions ; mais plus que de trompe-l’oeil, au sens pictural du terme, c’est de trompe-esprit qu’il s’agit : ses propositions sont à la limite du crédible, ses fictives recherches sur les biographies, ses fictives présentations de sa propre enfance, méticuleusement menées, renvoient son spectateur à une interrogation sur la réalité même de celui qui fait oeuvre. S’il s’agit, comme le dit son préfacier, Ohayon, d’une démarche baroque, elle renouvelle le baroque, s’il s’agit d’une démarche magique, elle renouvelle notre rapport à la magie, il y a, en même temps, chez Boltanski, une sorte de flirt constant avec la dérision, une distance telle, y compris face à la dérision elle-même, qui, tous comptes faits, le place dans une très originale situation dans l’art contemporain.
C’est cette même démarche, amplifiée, théâtralisée, qu’il présente à la galerie des Ponchettes : à partir d’éléments vulgaires, petits ressors, fils de fer, fétus dirais-je, et qui sont le solide, presqu’invisible, de son travail, la projection d’ombres amplifie sur les murs des tableaux en mouvement, éphémères... Ainsi ce qui reste ne se voit pas, ce que l’on voit ne reste pas... L’art est ainsi illusion d’une illusion, ombre de petits riens, fascination de l’incertitude.
Comme beaucoup de démarches parvenues à maturité, celle de Boltanski présente aujourd’hui un aspect immédiatement acceptable par un visiteur non averti qui se mêle à la fois à une histoire personnelle (son travail depuis une vingtaine d’années) et à l’histoire collective (ce qui s’agite dans l’art d’aujourd’hui).