PATRICK QUILLIER
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La talvera, la bordure du champ
non cultivée. C’est là que Jean Boudou,
épris des marges qui font tout le sel
de la terre, a élu son domicile.
Il a vu l’industrie des aliments
ruiner les paysans de son Rouergue
à coup d’entrepreneurs et techniciens
qualifiés d’agricoles, financés
par des banques superbement hors sol.
Et la talvera de rapetisser !
Il a vu son pays de pied en cap,
de la nature à tous ses édifices,
livré sans vergogne aux hordes modernes
du tourisme dévastateur, les filles
rouergates employées dans des parcs
à thèmes, changées en prostituées,
Domaisèlas de la « pincipautat »
del pargue nomenat « Espinergue ».
Et la talvera de se rabougrir !
Né à Crespin, en Ségala, le
11
décembre
1920, il perd
l’usage fluide de la langue à la mort
de sa grand-mère quand il entre dans
sa quatorzième année. Or, son grand-père
n’avait jamais pu prononcer 14
et la famille en avait donc reçu
pour sobriquet le nom de « Catòia »…
Le voilà donc, Jean Boudou, bégayant
le long du détroit resserré de la
talvera. Jean Boudou, alias Joan
Bodon, qui fera du balbutiement
singulier et puissant art poétique.
Sur la lisière c’est la liberté.
Sus la talvera es la libertat.
D’orée en orée va la vérité.
D’orièira en orièira : la vertat.