RAPHAËL MONTICELLI
Ce texte figure dans le catalogue de l’exposition de Jean Villeri au musée de Gap en 2017.
Il regarde
Il écoute
Il sent
ressent
souffre
se réjouit
Il enferme en lui même les bruits épars du monde
ses images ses peurs ses tremblements et vibrations
Et la mer est si proche
Dehors et dedans
Ses caprices
Ses franges de vieille dame bougonne
sa fausse tranquillité
ses vraies colères
ses séductions
ses draperies de salpêtre et d’écume
et ses grondements de forêt
vierge
La mer est si dense dedans
Il regarde écoute sent ressent
Il ne sait où tout s’accumule se sédimente
s’échauffe tourbillonne
Il ne sait où
Doit-il dire Dedans
Au dedans de soi
Il ne sait quoi
Tant de douleur et tant de joie
Le picotement du regard qui se brouille
Tout s’accumule et tourbillonne
dans un dedans de soi qui serait hors de soi
qu’il comprend
et ne comprend pas
qu’il contient et qui l’entoure
Dedans
c’est un souffle plus court le cœur qui bat plus vite le corps
qui veut aller
où ?
les odeurs d’encre d’huile d’essence la lumière
de l’atelier
ses ombres
sa paix
ses doutes
Sa musique
Il regarde écoute sent ressent doute
La toile
bras ouverts
bras en croix
La toile
et sa multitude de croix
La forme
quelle forme
Sagoma
Silhouette
Fantôme
Quelque chose d’incertain qui se balance dans l’atelier entre dedans et dehors
Nageur aux formes incertaines
Corps d’eau salée porté par l’eau salée
Quelque chose flotte
en murmurant une sorte de chant
sourd
Un chant d’aube souffrante
Mais un chant
Quelque chose flotte qu’il faut saisir
amadouer
Il regarde écoute
il voit il sent il doute
veut faire voir
cette forme muette à quoi il donne forme