BRIBES EN LIGNE
ce jour-là il lui aller à la bribe suivante  l’entretien début de la mise en ligne de constellations et nice, le 18 novembre 2004       jardin page précédente ► page références : xavier       qui mon cher pétrarque, 1- c’est dans et tout avait comme un prÉliminaire la le temps passe dans la en 1958 ben ouvre à inoubliables, les   six formes de la le flot gris roule contre antoine simon 9 que reste-t-il de la textes mis en ligne en mai je voudrais voir les arbres c’est — pense-t-on - À venise je dispose, sur le parcourir les espaces ► page suivante ► page       nuage     sur la kurt schwitters. :       un pourquoi yves klein a-t-il quand il voit s’ouvrir, un nouvel espace est ouvert textes mis en ligne en mai cinq madame aux yeux face aux bronzes de miodrag       bonheu dernier vers doel i avrat, un verre de vin pour tacher       l’ quelques autres à propos “la       en pour gilbert   pour olivier       pé noir d’en bas ► un buttati ! guarda  difficile alliage de 1254 : naissance de     ton plaisir depuis ce jour, le site page d’accueil de       sur la commençons donc par le accéder à l’article       sur le on préparait nos voix l’heure de la page suivante ► page       à "la musique, c’est le albertine c’est la chair pourtant page suivante page la bouche pleine de bulles avant-dire  “...       ma page d’accueil de textes mis en ligne en juin si j’étais un les amants se     hélas, À alessandra et encore   dits le 26 août 1887, depuis aller à la liste des auteurs on n’écrit qu’un vertige. une distance derniers textes mis en il existe deux saints portant pour accéder au pdf, sommaire des contributions josué avait un rythme traquer des conserves ! pénétrer dans ce jour, tes chaussures au bas de page suivante ► page nous serons toujours ces vers le sommaire des recueils madame est une le bulletin de aller à la bribe suivante       maquis la terre nous antoine simon 14       montagne questions de temps suivi de titrer "claude viallat, (la numérotation des page d’accueil de in the country aller à la bribe suivante samuel chapitre 16, versets 1 able comme capable de donner je serai toujours attentif à il n’y a pas de plus page suivante ► page sommaire des contributions cliquez sur l’icône qui d’entre nous       aux napolì napolì       ruelle page suivante ► page page suivante ► page d’un côté passent .x. portes, exposition et ouvrage de comme ce mur blanc iloec endreit remeint li os les céramiques et leurs les mots te viennent que tu    de femme liseuse page suivante ► page pour michèle auer et gérard ki mult est las, il se dort       quand à yvon quand une fois on a d’abord quelques l’impossible ecrire, la vie en dépend, à claude held patiente la       allong&e d’abord la crise du de mes deux mains réponse de michel textes mis en ligne en ping pong entre miche très saintes litanies la force du corps, page précédente retour à page suivante ► page       dans le il ne sait rien qui ne va commençons donc par antoine simon 30   entrons maintenant karles se dort cum hume rafale un texte venu de l’autre   dits de page suivante ► nous le poiseau de parisi mon « (…) et il       la       je me abu zayd me déplait. pas la musique est le parfum de le voici devant la toile des quatre archanges que pour robert page d’accueil de alain lestiÉ un art de la accoucher baragouiner effeuillage d’une feuille aller à la bribe suivante antoine simon 16 éphémère du 2 page suivante ► page sommaire ► page suivante toute une faune timide veille  jésus page suivante ► je suis né pour écouter ce moment de posté sur facebook sorti de on peut croire que martine rafale n° 5 un morz est rollant, deus en ad a l’aube des apaches, page suivante ►   les présentation du projet       fleurett page suivante ► page portrait. 1255 : page suivante ► page antoine simon 32    si tout au long   (à page suivante ► page edmond, sa grande toute trace fait sens. que a ma mère, femme parmi leonardo rosa 1er moins quinze hiver jamais je n’aurais ecrire sur préparer le ciel i aller à la liste des auteurs dessiner les choses banales       clquez sur aller vers le musicien nègre page d’accueil de page suivante ► r.m. a toi le géographe sait tout j’imagine que, comme tout Ç’avait été la       aujourd quand un critique français l’attente, le fruit sites de mes mais jamais on ne la poésie, à la sommaire des mises en présentation du projet et si j’avais de son pour lee       le certains prétendent nouvelles mises en nous dirons donc « non, peut-être par max et andré pour andré c’était une très jeune je découvre avant toi       su lou raphaël monticelli 30 juin  pour le dernier jour et ma foi, travail de tissage, dans a l’extrémité du sables mes paroles vous diaphane est le il y a des soirs où le le chêne de dodonne (i)       le       vaches une autre approche de abstraction voir figuration   un ( ce texte a pour accéder au pdf de Écoute, bûcheron, arrête sa langue se cabre devant le lors de la fête du livre <img852|left> forest jean dubuffet : honneur toutefois je m’estimais le chêne de dodonne (i) page suivante ► page 7) porte-fenêtre sommaire ► page suivante   nous sommes sous ces étagements liquides « je définirai la       à       vu les  je ne voulais pas tromper le néant ce qui importe pour station 3 encore il parle À propos de fata en derniers percey priest lake sur les       les aller à la bribe suivante sommaire ► page à cri et à page suivante ► page fragilité humaine. page suivante ► page voir les œufs de même si mise en ligne d’un a propos d’une       ".. "école de   maille 1 : que  les œuvres de     nous avions  tous ces chardonnerets « 8° de ce texte m’a été bernar venet - seul dans la rue je ris la comme une suite de dieu faisait silence, mais station 5 : comment  le grand brassage des lancinant ô lancinant aller au sommaire de pablo page suivante gérard (vois-tu, sancho, je suis sculpter l’air :       reine autre citation antoine simon 5 le samedi 26 mars, à 15 dernier vers aoi le thème sommaire ► page suivante guetter cette chose       "       cerisier     faisant la mes pensées restent la mort d’un oiseau. nous serons toujours ces outre la poursuite de la mise sommaire ► page suivante monticelli raphael 510 035 voir les œufs de "pour tes les lettres ou les chiffres       reine la pureté de la survie. nul textes mis en ligne en août 1 au retour au moment ce après la lecture de chaises, tables, verres, de sorte que bientôt pas même présentation du projet antoine simon 10       le mise en ligne       la       crabe-ta       o rafale n° 4 on le cliquer sur l’icône dire que le livre est une       apr&egra madame, on ne la voit jamais       bonheur pour egidio fiorin des mots voir aussi boltanski galerie       la l’annÉe 2022 mois par ce texte a été rédigé à aller au sommaire de pablo a-t-on remarqué à quel ils s’étaient sixième   un vendredi de prime abord, il page suivante ► page cent dix remarques i► cent  hors du corps pas la fraîcheur et la aller au texte nous sommes au labyrinthe des pleursils page suivante ► page errer est notre lot, madame, il n’était qu’un       "je aller à la liste des auteurs     m2   dernier vers aoi   je désire un introibo ad altare 1    le recueil que ce 28 février 2002. la vie est dans la vie. se est-ce parce que, petit, on tu le sais bien. luc ne      & (ma gorge est une page suivante ► page rare moment de bonheur, dernier vers aoi peinture de rimes. le texte cristina m’avait demandé les photos et archives       objectif autre essai d’un ceci… pour prendre mesure. pur ceste espee ai dulor e textes mis en ligne en mai À l’occasion de       en un le phonétisme n’a-t-il pas       pav&eacu zacinto dove giacque il mio à propos des grands m1          tu sais la difficile question des c’est seulement au la parol

Retour à l'accueil

ALAIN FREIXE

Quand manque {la grande image}
© Alain Freixe
Publication en ligne : 2 février 2022
Artiste(s) : Lestié

« Si l’homme a besoin de mensonge, après tout libre à lui ! Mais enfin : je n’oublierai jamais ce qui se lie de violent et de merveilleux à la volonté d’ouvrir les yeux, de voir en face ce qui arrive, ce qui est. »

Georges Bataille


Alain Lestié, Gravure 1

1-
Quand je regarde l’œuvre d’Alain Lestié, je pense à un homme en marche sur des terres inconnues. Quelqu’un qui a pris par l’étranger, sans cadastre, et qui va à l’estime, chaque avancée doutant de sa position nouvelle. Un homme qui passe attentif aux impasses. Moins cul de sac qu’apories, embarras de passage. Et moins obstacle qui soudain barrerait le chemin que cet embarras du choix quand la voie est libre et qu’au carrefour se divisent les routes sans que l’on sache quelle voie prendre ?

2-
Sous l’influence de Braque et du retour de Dada, il prend parti contre le courant abstrait. Ce sont ses premiers pas en 1963. Trois ans après, il s’arrête de peindre. Son retour à la peinture est marqué par l’abandon de l’huile au profit de l’acrylique qui lui permet de franchir quelques degrés vers plus d’impersonnalité. En 1993, c’est l’abandon de la couleur au profit des dessins au crayon Nero, argile et suies mêlés. 2010, sous l’impulsion de Jean-Paul Aureglia, maître d’œuvre des éditions Quadrige/La Diane Française, c’est la découverte de la gravure sur bois.

3-
Avec cette proposition d’un « Art au carré », courant 2012, le voilà obligé à revisiter parcours et étapes. Ce qui sera tout reprendre de la masse de dessins accumulés en plus de quinze ans : suppression, recadrages, réassemblages, greffes diverses. Une seule idée : tout ramener au présent de son exigence d’aujourd’hui. Cette nécessité de faire exister l’œuvre hors de soi et en avant de soi ne laisse pas de m’émouvoir.

4-
« Où commence l’avenir ? » Certainement pas en une fois mais c’est toujours le travail fait, déjà fait qui déclenche, en liaison avec quelque chose qui survient, par exemple, le projet de graver des bois ou tel événement plastique qui soudain fait apparaître un trait sans pareil dans la démarche du peintre. Une fracture, une déchirure, un jour à partir de quoi tout s’éclaire autrement. Le passé se transforme alors en réserve d’avenir. Ainsi de cet « Art au carré. »

++++

Alain Lestié, Gravure 2

5-
Si changent les techniques, le projet demeure : traquer ce que toute représentation traîne avec elle / en elle / autour d’elle d’illusoire. Simplement, si le crayon dématérialisait le tableau, lui ôtant matière et couleur ; la gravure sur bois qu’enlève-t-elle au dessin ? Toujours plus de matière ? Si avec le crayon et les dessins nous étions dans un « après la peinture », avec la gravure, à quels rivages sommes-nous promis ? Vers quel silence s’en va Alain Lestié, quelle nuit ?

6-
Les temps sont au crépuscule. Le monde va finir affirmait Charles Baudelaire en une de ses Fusées. Ce n’était pas la fin du monde qu’il annonçait mais l’entrée dans le monde de la fin . Et d’une fin sans fin ! Le monde s’enfle d’un surcroît toujours plus grand des apparences.
Avons-nous encore des images ? Question incongrue, ne sommes-nous pas entrés dans une civilisation de l’image ? Mais voilà, plus il y a d’images, plus le monde se ferme.
C’est ce monde que creuse l’œuvre d’Alain Lestié faisant de l’image le lieu privilégié d’une réflexion sur les pouvoirs de son illusion.

7-
J’entends comme un grand « non » dans l’œuvre d’Alain Lestié. Il est là d’origine et porte sur le visible. Ce que je vois, ça n’est jamais ça ! Ce que je vois relève du regard et non de la vue. Humain, il jette un voile sur les choses du monde pour les faire apparaître. Devant.
Ce « non » creuse son œuvre. Il me semble en être la justification dernière.
Quand on a compris une fois que la réalité – ce qu’on nous donne comme tel – relève de la fiction alors on peut aller jusqu’à penser que faire une image pour Alain Lestié c’est faire la fiction de cette fiction, soit une destruction de cette fiction. Alain Lestié « fait le négatif » selon les mots de Franz Kafka.
S’évader du jour avec les armes du jour en les retournant contre lui, contre son écrasante et infernale lumière. Parier pour la nuit et ses lucioles, lumières mineures qui tournent dans ses œuvres. A ce travail là s’est voué Alain Lestié.

8-
A première vue, c’est bien devant des images qu’on se trouve en présence des œuvres d’Alain Lestié. On sait bien que depuis le début, c’est là la belle querelle d’Alain Lestié. Toujours quelque chose est là, se présente visuellement. On peut même y reconnaître bien des éléments, des choses de notre monde : grillages, triangles, ferrures, branches brisées, ampoules suspendues, déchirures, failles…

++++

Alain Lestié, Gravure 3

9-
Chez Alain Lestié, ce qui se voit ressemble plus à des choses qu’à une chose ! Nous avons tout sous les yeux, la partition des cadres, dans le chevauchement des plans. S’il y a du caché, c’est du visible caché dont le tout nous dérobe la totalité. Et certes on pourrait arriver à tout dire, à dénombrer et nommer tout ce qui est là devant, offert à notre perception mais c’est alors le tout qui échapperait. Rien de mécanique ici, le tout n’est pas égal aux parties.

10-
Chaque dessin d’Alain Lestié ne donne que sur lui-même. C’est un point de vue qui donne sur le mystère…L’œil va, erre sur la surface peinte. Son chemin mène au chemin. Ou aux pierres. Si quelque chose se profilait au loin comme une sorte de but, de point d’arrivée, il serait extérieur au chemin.
Devant une toile, un dessin, une gravure d’Alain Lestié, l’œil joue à saute-mouton. Il passe d’un plan à l’autre, se fixe ici, est attiré là, se perd, croit voir et ne voit pas. On va à cloche-œil, sautant de toile en toile ou à l’intérieur d’une toile ou d’un dessin ou d’un élément à un autre en laissant le vide entre. L’œil erre, perdu, boule de flipper renvoyée par les bumpers.
Le regard qui s’attache à reconnaître ceci ou cela dans les images d’Alain Lestié, très vite, va boiter, chanceler, éprouver un certain déséquilibre sollicité qu’il est par les multiples appels venant des autres plans, des autres cadres dans le cadre. Ce regard ne peut se fixer, cherche un point fixe, un point d’appui, un point de vue, en vain. Plus de choses, plus de représentations, plus rien à percevoir. Voilà que nous flottons, entre deux eaux. Soit nous nous ressaisissons et renvoyons le tableau se figer dans sa dimension d’objet d’art, soit nous nous abandonnons à cette mise en suspension, porte d’entrée à un autre monde comme en formation.
11-
Surpris ! Saisis ! C’est de rencontre qu’il s’agit. Là tout commence. Les œuvres d’Alain Lestié nous imposent leur présence. Altérité, hétérogénéité, discontinuité, ruptures…asymétrie. Ne se reportant qu’à elle-même, c’est un monde nouveau qui s’ouvre. « L’asymétrie est jouvence » aimait à dire René Char !

12-
Les œuvres d’Alain Lestié pourraient bien relever de l’ordre de ce qui reste portant la trace de bien des effacements, des condensation, des séparations, des déplacements…Si dans le rêve c’est le travail de l’inconscient que d’assembler des lambeaux hétérogènes, dans les œuvres d’Alain Lestié c’est l’esprit qui bâtit ses images souvent à partir de questions abandonnées dans quelques œuvres antérieures ou d’éléments restés incompris et qui appellent au jour du montré. Alors pas à pas, c’est-à-dire bribe à bribe, par le cheminement même du dessin ou de la gravure, se met en place le dispositif visuel final, organisation paradoxale qui déroute le sens du discours auquel on pouvait s’attendre et la transparence représentative des éléments figurés. L’œuvre n’est pas un décalque, une copie, une chose seconde. Elle est « le dedans du dehors et le dehors du dedans » selon les mots de Maurice Merleau-Ponty.

++++

Alain Lestié, Gravure 4

13 -
Une œuvre d’Alain est faite de ces « sembles » dont parlait le poète Samuel Taylor Coleridge et qu’il définissait comme « ce qui semble être et n’est pas ». Soit un simulacre.
Simulacre qui chez Alain Lestié est tout sauf un trompe-l’œil, ce serait plutôt un « détrompe-l’œil ». Son œuvre simule une vision intérieure qui se trouve extériorisée aujourd’hui par le biais du crayon Nero ou des outils à graver selon les règles les plus traditionnelles, les stéréotypes institutionnels qui servent à montrer. Simplement Alain Lestié les surcode, les parodie. Tout y est exagéré. Et je ne dis rien de ses jeux sur le cadre qu’il démultiplie dans sa « fenêtre » jusqu’à figurer la corniche du moins ce qu’il en reste.

14-
Le simulacre chez Alain Lestié par sa subversion des stéréotypes vise à nous tenir éveillés et comme sur nos gardes. En effet si le vraisemblable est la tragédie du vrai tant plus ça a l’air vrai moins ça l’est, le simulacre est alors déblayage et ouverture à l’incommunicable. Non pas qu’il donnerait à voir ce qui est caché. Rien ne vient à la lumière de l’œuvre. Ce qui est présenté n’est pas ce qui est à voir. Autre chose est suggéré, autre chose à venir, à advenir. Hors de l ‘œuvre. Ce qui est donné en pâture à l’œil suggère et dérobe dans le même temps une autre scène. Les œuvres d’Alain Lestié ne représentent pas. Ils résonnent. Par là ils rendent « présents l’absence » aurait dit Paul Valéry. Irais-je jusqu’à dire qu’ils sont poésie ? Oui, si l’on se souvient des mots de Marina Tsétaïeva : « Il y a quelque chose dans la poésie qui est plus important que le sens : la résonance »

15-
Il y a toute une violence à l’œuvre dans le travail d’Alain Lestié. Une violence de la vérité telle qu’elle se retire dans son apparition même puisqu’elle consiste à tendre la surface afin d’y entretenir des intensités et à ouvrir le lieu pour qu’y passe rien, soit « l’imminence d’une révélation qui ne se produit pas » comme l’écrivait Borgès.
Où se tient-elle dans les œuvres d’Alain Lestié ?

16-
Dans la ligne.
Il y a une manière de séparer, de couper qui tient du coup de couteau. Souvent, une ligne dans l’image partage / partitionne l’image. Un noir tiré. Points de vue sectionnés. Quelque chose d’intraitable, d’irréductible. La brutalité de ce qui saute aux yeux.
Pas de représentation de la violence mais une violence exercée : lignes coupantes, plans, déchirures, fragments… Coups portés à la peinture…qui se retournent en coups portés par le tableau peint au regard.

++++

Alain Lestié, Gravure 5

17-
Dans la répétition.
Ce que fait Alain Lestié entretient un rapport avec la répétition. Ce que l’on voit pourrait encore nous tromper – je pense au retour de certains signes : ampoules allumées, branches brisées, étoiles, croix, silhouettes, fragments de murs, triangles, spirales…- car il ne s’agit pas d’un phénomène de réitération de quelque chose qui n’aurait pas changé, d’un bloc d’immuabilité qu’il reprendrait tel quel – la disposition des signes est nouvelle , toujours surprenante ! – mais bien d’une reprise, d’un aller chercher dans l’ancien ce qui s ‘y tenait à l’abri, comme en dormance, graines du feu sous les cendres.

18-
Dans les oppositions et les hybridations.
Oppositions et hybridations d’éléments hétérogènes dont se sert Alain Lestié pour bâtir ses images et libérer des énergies que les éléments pris isolément n’auraient pas. Ce sont ces énergies provenant d’une mise en tension des éléments qui nous retient. Un flux passe. Un rythme…

19-
Dans les mots.
Ceux présents dans les images : mots latins, graffitis parfois effacés, parfois raturés qui jouent ou pas avec les éléments représentés au plus près de leurs stéréotypes, les figures géométriques (spirales, arcs de cercle, triangles, angles…) comme ceux ni symboliques, ni explicatifs, qui hors des images font titre et dont on ne sait s’ils font partie de l’œuvre et selon quelles modalités alors ou pas…

20-
Dans le cadre.
Chez Alain Lestié, il est instance de variation de l’espace pictural et des modalités de la représentation. Alain Lestié qui connaît la nature et la fonction du cadre dans l’histoire de la peinture (croyance et envoûtement), en faussaire déclaré, en bandit de la représentation entend le conserver pour mieux le subvertir de l’intérieur.
Le cadre, ce carré selon l’étymologie, avec ses bords et rebords, frontière et limite s’il autonomise l’œuvre dans l’espace visible, s’il met la représentation en état de présence exclusive la transformant en objet de contemplation, chez Alain Lestié loin de mettre le regard à l’abri, sa démultiplication le désabrite plutôt !

++++

Alain Lestié, Gravure 6

21-
Alain Lestié a beau encadrer ses dispositifs visuels, la manière dont ils jouent les uns avec les autres, dont ils se bouleversent, témoigne du travail d’une force qui vient d’ailleurs, d’avant le cadre et que le cadre ne parviendra pas à limiter. Cette force prend ses formes dans le cadre mais elle le traverse. Se trouve sauvée par là l’intensité que les divers codes convertissent et monnayent en représentations.
Pour que quelque chose passe, il faut flux et reflux, c’est cette coupure qui assure le saut, bond et rebond. Un rythme…

22-
Sans discuter l’appréciation de Jean-Marie Pontévia qui voit la peinture d’Alain Lestié comme relevant d’une « peinture française », j’oserais dire qu’en présence de son travail, je me sens plutôt espagnol. En effet, s’il y a bien une lumière dans ses œuvres, si « l’ange » y a bien travaillé ; si la « muse » a tiré du chaos des formes dont se jouent les cadres qui partitionne l’œuvre ; j’y sens battre ce « duende » dont parle Garcia Lorca qui comme un démon tient l’ensemble. Ça ne devrait pas tenir, et ça tient. Un rythme assemble et tient ensemble ces morceaux disparates d’images qui font les images d’Alain Lestié.

23-
Surtout ne pas confondre le rythme avec la cadence, cette idée de mesure qui renvoie au tic-tac spatialisé des horloges. Le rythme est du coté de la vague toujours en formation, en auto-mouvement vivant en quelque sorte sur la crête d’elle-même, renaissant de ses propres failles. Les œuvres d’Alain lestié respirent – tendez l’oreille ! – un rythme souffle entre les noirs et les blancs, les traits et les espaces. Dessins et gravures prennent vie. Rien, du blanc, du vide, c’est lui qui fait s’animer le plein de la figure par le rythme des traits ; c’est lui qui est générateur d’énergie – J’ai vu Alain Lestié se pencher sur le bois et y aller de quelques creusements pour blanchir tel ou tel espace – évider, donner place au vide, condition première du rythme. Le vide est dans le suspens du respirer. Le rythme n’est pas un mode de la représentation mais un mode de la présence. Comme tel il échappe au langage. Il est de l’ordre de cette « signifiance insignifiable » dont parlait le poète Hugo Von Hoffmansthal.

24-
Après l’été des pointes et des gouges, dans l’hiver de l’encre émergent des poussées. Ecarts et charnières. Traînées ébréchées de lumière. Des noirs ? Non ! Des champs de neige, la nuit. Et la caresse violente des étoiles. Le ressac de leurs lumières. C’est cela que l’on peut entendre dans ces huit gravures d’Alain Lestié.
Oserais-je dire que ses « dessins de peinture » aussi sont faits moins pour être vus que pour être entendus ? Qu’ils sont moins objets que voix. C’est dans la déroute du voir, lorsque les traces figurées se sont détachées de leurs types, fruits d’un savoir antérieur et figé et qu’elles se sont comme effondrées sur elles-mêmes, que l’œil peut alors écouter comme le disait Paul Claudel. Et ce que l’on entend alors c’est la petite musique d’un sens qui file vers son horizon impossible.

++++

Alain Lestié, Gravure 7

25-
Et si c’était là le sens de toute véritable image : nous ouvrir l’œil ? Le sens n’est pas explicatif. Le sens ne nous sert pas à domestiquer le monde. Le sens vient déranger, troubler, ouvrir, sans fin. Il ne fixe rien, il est agent de transformation. Transformation interminable. Le sens, c’est l’impossible.

26-
S’il est un effort largement partagé par la modernité picturale, c’est bien de se défaire de la référentialité réaliste et du vieux rapport sujet / objet. L’art moderne est un art de l’impossible. Ne tente-t-il pas, voile après voile, de figurer le Réel, le Réel comme énigme du Surgir et du Sombrer, selon les mots de Hegel ?
C’est cela qui émeut chez Alain Lestié, cela qui demeure au travers des changements, c’est le fait de porter la peinture comme art de l’impossible, saisir l’essence du visible dans une image. Faire une image, c’est toujours voir apparaître le chat et son sourire et jamais le sourire sans le chat comme chez Lewis Caroll.

27-
Un échec passe sur les œuvres d’Alain Lestié, ses souffles et leurs brouillards. C’est celui de l’art actuel dont Jean-Marie Pontévia disait qu’il « (partait) de l’échec ». Mais il précisait : « Ce n’est pas un art qui échoue. Il est échoué. (…) L’art actuel vient après : aucune illusion n’est plus possible. »
A persister comme le fait Alain Lestié cela fait signe non vers un épuisement du désir, une faillite de l’énergie mais au contraire affirme une fidélité à l’acte de création quand il cherche à en finir avec l’illusion. Alors un désir se déploie dans l’espace de la composition.

28-
Alain Lestié politique ? Oui, si tout système social qui fait notre être en commun a son fondement dans la représentation qui nous voue au semblant, aux pièges de la mimesis qui suppose l’existence d’une réalité, une objectivité du monde qu’il suffirait de refléter, de copier, réalité toute fictionnelle, répétant dans un langage usé, des images sans distance, traçant les contours ombreux d’un pays du bon sens falsificateur, pays de fantômes, images d’images.

++++

Alain Lestié, Gravure 8

29-
Quand le jour, le monde, est aux mains des assassins, peindre pour Alain Lestié fut opérer ce saut de côté « hors du rang des assassins », comme le disait Kafka à propos de l’acte d’écrire, s’écarter de ce « village du bon sens » dont les paroissiens s’entendent à répéter la mauvaise vie, ses voiles et ses illusions, déménager pour la solitude et la nuit, là où il ne fait jamais assez noir. D’œuvre en œuvre, de prise en prise, de déprise en reprise, Alain Lestié tient tête au jour, au monde, à ce qui en face toujours se dresse au nom d’un inconnu à jamais inconnu, l’ouvert d’un rien, l’éclaircie d’un bond, d’un saut de côté..

30-
Reste une seule question : comment échapper aux structures de la représentation ? Comment on s’en sort ? Si c’est l’unique question de la littérature, c’est aussi celle de la peinture !
On n’en sortira pas, on le sait. Mais au contact des œuvres comme celles d’Alain Lestié, on a à l’avant de soi, matérialisée, la décision irrévocable de ne jamais renoncer à trouver une issue.

31-
D’œuvre en œuvre, c’est « une machine de guerre » dont l’objet n’est pas la guerre que travaille à bâtir Alain Lestié. Un agencement de lignes de fuite qui vise la résistance. Le se dresser debout, souffle maîtrisé, vue dégagée. Rupture verticale pour une transcendance horizontale, celle qui voue le sens à l’inachevable.
D’œuvre en oeuvre, c’est une route. Ouverte. Je ne peux pas ne pas penser à Jack Kerouac pour qui la route était « la grande maison de l’âme », le lieu où ce que dit ce mot trouvait à se réaliser. On ne se met pas en route pour s’enrichir – c’est toujours s’alourdir ! – mais pour que la route vous lave de toutes les pluies du ciel et, sous les soleils revenus, vous presse, vous essore et vous sèche. On marche, on travaille pour se détacher…

32-
Oui, j’oserai reprendre à propos d’Alain Lestié ces mots que Rainer Maria Rilke écrivit le 11 septembre 1902 à Rodin : « Ce n’est pas seulement pour faire une étude que je suis venu chez vous, c’était pour vous demander : comment faut-il vivre ? Et vous avez répondu : en travaillant. Et je le comprends bien. Je sens que travailler, c’est vivre sans mourir. »

Un message, un commentaire ?

Forum sur abonnement

Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.

Connexions’inscriremot de passe oublié ?

Suivre la vie du site RSS 2.0 | Plan du site | Espace privé | SPIP