PATRICK JOQUEL
Il y avait eu les éphémères publiés en ligne sur ce site en 2010.
Il y a eu les éphémères du passant aux éditions Océanes, les éphémères du bouquetin aux éditions Corps Puce et puis en 21, avec le thème du Printemps des Poètes 22, j’ai repris ce type d’écriture. Voici donc Les Éphèmères 2021.
Éphémère du 22 juillet
à Dominique Lallemand
cette nuit, j’ai nagé avec une orque. En surface et en profondeur. J’ai caressé sa peau. Comme un jeu. Une main pour le noir. L’autre pour le blanc. Caresses pour un tour de corps. Étapes sourires. Ce matin le Yunnan a un goût marin.
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Éphémère du 26 juillet
à J.Held
L’été. Les tomates. Dressées. Leurs jeux de couleurs. Nuances de verts. Délicatesse de la fleur. La gamme des rouges. Ou selon la variété des jaunes, des noirs…
les odeurs après la pluie. Pendant la cueillette. Leur éclat sur la table. Bientôt le ronronnement du filet d’huile d’olive, le miaulé du basilic.
Bon appétit.
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Éphémère du 28 juillet 21
à Hossein Bayat
Place de la Mairie. La fenêtre du bureau de Laurent comme un écran. Des platanes. La brise. La légèreté des ombres sur le sol. Film en noir et blanc.
Des centaines. Des milliers de feuilles. Le vent les compte-t-il à son passage ? Attend-il l’automne ? Et que fait-il de son décompte ?
Je guetterai en octobre les dix dernières feuilles pour jouer avec elles un ultime compte à rebours.
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Éphémère du 29 juillet 21
à Jean Corbucci
on dit l’incessant clapotis de la mer. Je l’écoute. Le mot clapotis est réducteur. Subtiles variations du rythme. Mélodie du ressac. Loin d’être un bruit de fond, c’est un orchestre de crique.
À l’écouter je m’exerce à l’immobilité du goéland quand il tente le mimétisme rocher. Plus rien ne bouge/ pas mème un cheveu. Rien sauf les paupières et les poumons. La mer. Je l’écoute. Je me dis que je n’écoute jamais assez loin.
Des milliers d’années de clapots et chaque seconde un son unique. Pas différent. Juste une ligne mélodique. Une impro à l’affût de la note bleue. Frangée d’écume légère. Calme. Une partition. La Terre est une partition.
Tempo d’une cigale. Envol du goéland. Mes yeux le suivent. S’envolent.
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Éphémère du 30 juillet 21
à Anne Piquemal
menu breakfast : le grand bol gris de la méditerranée. Air frais. Mer agréable à nager. Ouverture de la terrasse de la cabane l’Entorse : parasols et tables bleus. Une tasse de café. Horizon fondu dans les nuages. Silence. Pas de vague. Quelques mouettes en quête d’un premier poisson. Piqués. Pas facile une vie de mouette. Plus difficile que tremper un croissant dans son café. Finalement, l’humain a de la chance. Surtout celui du 21e siècle. « Bonjour, un café croissant s’il vous plait » et hop tout apparaît. Sourire offert. Ce n’est pas le gris de ce petit matin qui va gâcher la joie du café après la nage. Non. Une goutte cercle le café dans sa tasse. La pluie. Enfin une goutte. Une deuxième. Et d’autres. Mais tranquilles. Pas de quoi transformer le parasol bleu en parapluie. Le ciel respecte la pause café. Merci la vie.