RAPHAËL MONTICELLI
Que la peinture ne se développe qu’à travers les problèmes plastiques que se pose le peintre, voilà qui va sans dire. Que le peintre ne se pose, en tant que peintre, que les problèmes que lui pose la peinture, voilà encore qui devrait aller de soi. Que le peintre s’aperçoive qu’il n’est pas le maître des problèmes qu’il se pose, voilà cette fois qui est louable. Mais qu’il découvre que la peinture ne se pose comme problème qu’en tant qu’elle est elle-même soumise à d’autres règles que les siennes, voilà qui ne va plus ni sans dire ni de soi, et qu’il faut applaudir des deux mains. Et c’est bien là ce que la nouvelle génération semble penser : que la peinture n’est rien qu’un processus dont les conditions de possibilité sont à chercher dans la place et le rôle qu’une société attribue aux peintres.
Est-ce donc pour échapper à la conscience de cette soumission que les seigneurs de la nouvelle peinture sont à la recherche de la « simplicité » par le recours aux « origines » matérielles de leur art ? C’est bien d’une fuite qu’il semble être question quand on connaît les débats plus ou moins passionnés sur le châssis, la couleur, la matérialité de la toile, la représentation...
Il est un peintre pourtant qui fait le jacques. Il a bien exposé avec la plupart des nouveaux seigneurs et avec quelques hobereaux, a pris part à tous les débats [1] que la mal-nommée avant-garde connaît depuis une dizaine d’années, mais peut avoir recours au châssis et sa peinture présente des images ; on prétend même, à le voir arriver avec ses gros sabots dans des questions qui méritent discrétion et éducation, qu’il est fort peu au fait de ce-que-la-peinture-doit-être. Ce peintre, relativement connu, mais fort mal introduit, éloigné des marchés, donc des éloges, c’est Marcel Alocco.
[1]
(1)1 Cf. IN-SCRIPTION d’un ITINERAIRE (textes de 1968 à 1970) et la (DE)-TENSION (textes de 1970 à 1972) de Marcel Alocco. Dès 1967 Marcel Alocco prend part au travail qui se manifestera lors de diverses expositions, en particulier à l’Ecole Spéciale d’Architecture (Paris, 1969, groupe Alocco, Dezeuze, Dolla, Pincemin, Pagès, Saytour, Viallat) et qui préludait à la naissance, en 1970, du groupe Supports/Surfaces.