THIERRY RENARD
à Jean Charlebois,
de l’autre côté de l’océan Atlantique
« Un rêve pour dormir hors de mon sommeil
qui se plaît à dire le plus grand fleuve à vif de toi
réveille-toi pour que je me trace un sens des yeux de plus
pour la journée pour la vie toute ma vie toute une vie »
Jean Charlebois, Au même moment
Depuis la nuit des temps, le désir, sous ses différents aspects, s’est toujours montré nu sur le devant de la scène.
Un désir durable, donc, et aux multiples couleurs et facettes.
Depuis ces temps très anciens, que j’évoque ici, le désir n’a jamais pris une ride.
Il y a, bien sûr, le désir et ses retenues. Chemin escarpé à emprunter. Ou rivière aux eaux fraîches et profondes – à traverser lentement ; sur la pointe des pieds, presque.
Il y a la Mour, l’Amort, selon l’étonnante formule du poète québécois et ami de fort longue date, Jean Charlebois.
Il y a l’amour à mort, la mort subite et l’amour fou.
Il y a les mots anciens, les mots forcément dépassés, les mots perdus puis retrouvés, les mots déposés sur la page, ou inscrits dans le marbre.
Et il y a tous les mots neufs, les mots nouveaux.
Le désir est un songe aux mille apparences principales, ou aux cent visages inespérés.
Le désir et ses pertes – trop souvent accumulées, bousculées…
Le désir et ses plaintes.
L’absence de désir, le manque.
Le désir est un poème de chair, de sang et d’os.
Le désir est partout.
Et nous avons voulu, seulement, lui rendre toutes ses couleurs, en passant notamment par le blanc du silence, par le bleu du ciel ou de la mer, par le jaune de l’éveil, du rayonnement, par le rouge de la passion, par le vert de l’espérance, par l’orange des plaisirs, par le violet de la solitude et de la mélancolie et, enfin, par le noir de la nuit.
Le désir est partout.
Et nous avons souhaité, tout bonnement, concilier, réconcilier tous les désirs et leurs partisans.
Souhaité, encore, laisser s’ouvrir toutes les ailes du désir.
Le désir est le seul mot que l’oubli n’est pas prêt d’oublier.
Un poème sombre, dans l’air, est passé, entraînant avec lui quelques ombres.
Le deuxième confinement a eu lieu, et il a bien fallu se réinventer.
Alors, vite, sans cesser nos promesses et sans perdre plus de temps, nous avons opté pour tous les imaginaires du désir.
Et nous n’avons pas failli.
Le virtuel ne remplace pas le monde réel, voire surréel. Mais il permet, cependant, aux choses de résister, puis d’exister vraiment.
Il casse les habitudes et renverse les certitudes.
Le virtuel, quelquefois, devient quasiment naturel.
Nous le réaffirmons, aujourd’hui : Les arts et la culture ont plus que jamais besoin de nous.
De nous toutes et tous.
Besoin de prendre l’air, et aussi tous les risques.
Le futur n’est pas si loin, où nous pourrons peut-être retrouver une vie ordinaire, moins détournée.
Le futur, nous l’avons également prétendu, ne se construira que dans la proximité ou la présence de chacune et de chacun d’entre nous.
Le désir.
Tel un grand bruit d’étreinte et de liberté.
Vénissieux, le mercredi 18 novembre 2020 ;
même endroit, le samedi 12 décembre