RAPHAËL MONTICELLI
RM : Le travail mis à plat présente des surfaces diversement colorées. Cet emploi de la couleur est, à mes yeux, l’un des points forts de ton travail... C’est la colle elle même qui est la plupart du temps colorée, et tu ne colores ni pour interpréter, ni pour exprimer, ni pour enjoliver, ni pour heurter... Tu colores pour différencier les plans de l’espace que tu traites. Ce rôle fonctionnel de la couleur permet de « lire » les trois dimensions une fois la pièce mise à plat...
MC : A Reattu, j’ai fait trois approches différentes de la couleur, une sorte de progression, d’une pièce bichrome, à une pièce fortement et violemment polychrome, celle qui a été faite sur le puits. La richesse du lieu a dicté ça.
Petite anecdote... La gamme colorée de la pièce du puits repose toute sur le rose délavé. Ce rose délavé, je l’ai choisi parce qu’il fait le fond du « Portrait de Lee Miller » de Picasso, qui est conservé au musée Reattu. C’est un rose... osé ! Ça m’a amusé, ce rapprochement...
RM : Je ne vois rien de vraiment anecdotique là dedans... Ton emploi de la couleur est fonctionnel, et ton choix, s’il n’est ni purement symbolique ni affectif, n’est jamais arbitraire : il y a toujours dans ton choix des couleurs quelque chose qui tient à la citation, la référence, l’hommage... Il faudrait qu’on revienne un jour sur cette question. Et sur ce cas particulier du rapport à Picasso au musée Reattu... Nous avons déjà parlé ensemble de cette différence qu’il y a entre « faire entrer dans un espace bâti ancien des oeuvres de la modernité et de la contemporanéité », ça c’est Picasso, à Arles, à Antibes, à Vallauris, à l’Hôtel Salé, à Barcelone, mais c’est aussi la plupart des artistes modernes et contemporains et c’est le rôle muséal dévolu au patrimoine bâti ; et « faire une oeuvre d’art à partir du bâti ancien », prestigieux ou non, comme tu le fais. Je lirais volontiers la relation explicite au « portrait de Lee Miller » dans cette problématique là...