RAPHAËL MONTICELLI
RM : Et tu as fini par travailler sur le puits...
MC : Elle semblait vraiment y tenir... Et l’endroit était difficile et passionnant. Le puits, c’est d’abord une pièce dans laquelle se trouve le puits. C’est un passage complet, ça peut se traiter du sol au plafond, et, à l’intérieur de la pièce, il y a le puits lui-même qui fonctionne comme un objet monumental. Pour travailler sur le puits, j’ai renoncé à un autre projet...
RM : Tu as explicité la commande, accepté le contrat, pris en compte le rapport d’un tiers à l’espace que tu traites...
MC : Ça a fonctionné de la même façon pour la pièce que j’ai faite sur la petite maison... La petite maison, c’est extérieur au musée lui-même et ça va lui être annexé après réfection. Michèle tenait à en garder une trace, une mémoire.
RM : Encore la commande, encore de la lecture.
MC : Oui. Et la troisième pièce, je l’ai faite sur un escalier à l’intérieur du musée. Ça a été un régal de travailler sur cet ensemble.
RM : Tu as donc déterminé tes espaces, procédé à tes recouvrements, et tu laisses sécher... Pendant ce temps-là...
MC : Ça peut durer des mois quand je ne suis pas pressé.
RM : pendant ce temps là, les gens passent et inscrivent leurs traces. Lorsque la toile est sèche, tu l’arraches du mur. Cette opération est proprement spectaculaire. L’investissement physique l’apparente à un travail de force : ça peut être en effet des heures de découpes -de dépeçage, disent ceux de tes commentateurs qui cherchent dans ton travail une relation à la chasse- de décollage, d’arrachage et de manutention ; le problème étant parfois tout simplement d’arriver à sortir l’oeuvre de l’endroit où elle a été produite tant elle peut être ample et lourde. Le but final est de mettre à plat ce recouvrement. Problème de toute la peinture : donner une représentation en deux dimensions d’une réalité tridimensionnelle.
MC : Et à Reattu, il y a aussi la qualité des lieux dans lesquels on présente les pièces. La salle dite de la Chapelle, qui est l’un des lieux d’exposition, est très belle, très imposante, je me demande bien comment le boulot va réagir là dessus... J’aimerais que ça prenne bien du sol au plafond, quitte à provoquer un effet de surcharge ou d’étouffement...
RM : Tu verras ça sur place, les lieux te dicteront sans doute des modes de présentation...
MC : C’est ce que dit aussi la conservatrice, mais je ne voudrais pas qu’ils me l’imposent. Je ne cherche pas à embellir un lieu, mais à présenter un travail.