RAPHAËL MONTICELLI
Introduction
Texte d’une conférence devant les Amis de la Liberté, en septembre 2010
Voici donc la troisième fois que j’interviens dans le cadre des conférences des amis de la liberté. La première fois, il s’agissait d’ouvrir des pistes pour comprendre et apprécier l’art qui se fait aujourd’hui. La deuxième pour questionner le marché de l’art.
C’est sur ce même sujet que porte notre rencontre d’aujourd’hui. Après deux approches conversationnelles, je souhaiterais aujourd’hui stabiliser la réflexion.
Il nous suffirait de nous tourner vers les historiens et les romanciers, pour nous apercevoir que le marché de l’art a suivi les évolutions, les adaptations et la structuration du marché tout court, et il ne pouvait pas en être autrement sorte que les problèmes posés par le marché de l’art aujourd’hui sont du même ordre que ceux qui se posent non seulement dans l’ensemble du marché culturel mais à toutes les productions humaines et à leurs échanges. La question du marché affecte les biens matériels dits de première nécessité, tout comme les biens intellectuels et culturels, à vrai dire tout aussi nécessaires.
Je me centrerai, comme prévu, sur la production artistique. Comme toute production, elle répond àdes besoins spécifiques. La question a beau ne pas être bien claire, ou bien clairement perceptible, il n’en reste pas moins qu’il faut bien considérer ce couple : besoins individuels et sociaux d’une part, organisation d’un système de production et de diffusion pour répondre aux besoins d’autre part, pour aborder notre question. Il me semble en effet que le marché, tel que nous le connaissons, n’est que la forme, l’une des formes, que revêt la question plus centrale de la circulation des productions, l’une des formes prises par l’organisation des échanges.
Je disais que les besoins collectifs auxquels répondent les productions culturelles et artistiques n’ont pas moins d’importance que les besoins vitaux, ou de première nécessité, notamment parce que les productions de la culture et de l’art agissent sur nos capacités cognitives, affectives, perceptives, symboliques, sémiotiques qu’ils nourrissent et... cultivent, justement . Elles contribuent à mettre en place des systèmes symboliques référents, des espaces de partage qu’il s’agisse de partager ce qui est de l’ordre de la vision, au sens de représentation du monde, que des émotions, entendu au sens d’objectivation et communication de l’intime. Ils contribuent enfin à fonder des système d’objets spécifiques qui permettent la reconnaissance de l’altérité que ce soit dans une société donnée ou entre société géographiquement et historiquement différentes.
Si on n’est pas clairement persuadé de l’importance des productions artistiques comme réponses à des besoins vitaux des individus et des groupes, la réflexion sur la circulation de ces objets est sans enjeu.