Ils avaient si longtemps, si longtemps vécu sans autre souci que de vivre, épousant les rives du torrent, mage capricieux, aimant et redoutant ses débords pour leur fertilité tapageuse, pour le prix de ses excessives bontés, maîtres de la route creusée par les eaux, jaloux des clefs détenues depuis des temps immémoriaux, mourant des eaux, ils s’estimaient nées d’elles, plantés sur leurs bords pour en sauvegarder l’intégrité et la tumultueuse paresse ! Ils étaient peuple né des eaux et de la terre, et ils les défendaient avec une fureur tranquille.
Si longtemps ils avaient vécu dans l’unité, si longtemps ils n’avaient reçu qu’allégeance de ceux qui empruntaient leur route, ou en avaient réduit l’insolence par des escarmouches si rapides qu’ils ne les avaient pas vu croître en nombre et en danger.
AOI