Restes
Au milieu de cette cour – tu n’es rien que cela qui toujours se dresse. Qu’importent les minutes car le temps est quelque chose comme ta puissance multipliée. Au milieu de la cour où l’on entendra bientôt une sorte de sonnerie tu grandis ta chair – est-ce de l’indifférence. Tu te sens toi-même nu par les minutes passées de l’automne.
Au plus près de ta grandeur je m’approche. Tu as beau être nu – tu n’es rien pour moi qu’enveloppé dans tes chairs – toujours présent à toi – toujours dressé à l’origine du sol. Moi-même je m’approche – est-ce là de l’indifférence – à tes pieds je me roule. Il y a là tes pieds au plus profond de la terre – il y a là tes racines et l’origine invisible de ta plus haute fixité – toi la puissance nue seule en ton centre.
Il est vrai que je suis en ton centre – et ta peau a bien quelque chose de l’écorce. Je le sais – tes chairs en toi se sont retirées. Je le sais – et cela ne me dérange pas – cela ne me dérange pas de compter les minutes. Assise en ton milieu – que suis-je sinon ta nudité sinon une chair nue que tu as oublié de rassembler. Au creux de tes racines – il y a là ta fermeté au plus près de son origine ni visible ni voilée. Il y a ma chair nue quelque part en ton centre.
Au fur et à mesure des minutes il a fallu fermer les yeux – si c’est cela la nuit je ne sais pas. Mais je n’ai pas froid – tu sais. Il faut avoir du temps pour avoir froid. Et il y a mes mains qui ne savent pas quoi faire – il y a mon corps embarrassé en ton milieu. Tu sais – il faudrait que tu m’aides – l’éveil est pauvre – rien n’est plus pauvre qu’un commencement. Et mes mains – mes pauvres mains retirées au-dedans de ma chair.