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RAPHAEL MONTICELLI

Claude Viallat : une renversante humilité
Publication en ligne : 12 novembre 2010
/ article dans revue d’art
Artiste(s) : Viallat

Texte pour l’ouvrage de Claude Viallat aux éditions de la Diane française.


AVANT-DIRE

 “... parler une langue autre (...) immédiatement perceptible”
C.V.
 
Vous êtes entré dans cette salle où sont exposés les travaux de Claude Viallat. Vous vous dites “travaux” parce que vous savez le travail. Mais ce n’est pas d’abord le travail qui vous est dit ici. Vous êtes entré et vous avez plongé. Avec jubilation. Vous vous êtes immergé. Enfoui. Ou vous avez senti que vous flottiez dans le silence des lumières inconnues et familières. Vous avez lâché vos anciens parapets. Autour de vous, ce sont frondaisons et mousses, marais et cours d’eau, cascades, marées, vagues, étendues de mondes jamais vus, respirations sous-marines, ciels peuplés de soleils multiples. C’est l’envahissement d’une forme -évidente, simple, banale, commune, donnée, présente, silencieuse- qui flotte dans d’anciennes liquidités qui l’imbibent, lui donnent la forme qu’elles lui prennent, répandues, débordantes, glissantes, vibrantes, à peine limitées par le format sur lequel elles s’étalent. C’est que, vous le sentez bien, la limite pourrait ne pas être là. C’est qu’il n’est de limite que dans les failles entre deux zones, entre deux œuvres, entre deux pièces. C’est que les formes et les couleurs poursuivent leur étalement sous les failles, ou que leur étalement sourd des failles. Phréatiques. 

++++

PRÉAMBULE

 “s’ouvre d’un bloc la porte qui paraissait fermée.
L’idée s’infiltre et le sens sourd”
C.V.
 
Dans le courant des années 60, Viallat fut l’un des protagonistes et l’une des références des dernières avant-gardes françaises. Avant d’être nommé à Limoges, en 1968, il enseigne aux beaux-arts de Nice entre 64 et 67. Ce sont là des années déterminantes où on le voit ouvert à toutes les recherches et réflexions de l’époque, en contact suivi avec Parmentier qui vient de fonder, avec Buren, Mosset et Toroni, le groupe BMPT. Il entretient des relations avec le très dynamique milieu niçois -on commençait alors à parler d’Ecole de Nice- se lie avec des critiques comme Jacques Lepage ou Marcelin Pleynet, des artistes comme Ben, Alocco ou Arman... Il fait partie des peintres qui mettent en place une problématique nouvelle, analytique et critique et, en 1970, il fonde, avec quelques autres peintres, le groupe Support-Surface.
On connaît ce récit de Genèse : considérant le champ de la peinture, et en en reconnaissant les constituants, Viallat, Saytour et Dezeuze, tous trous membres du groupe Support Surface, se partagent le champ comme on se partagerait le monde : à Dezeuse échoit le châssis, à Saytour la toile, à Viallat la forme ou l’image. Même si la notion de constituants, empruntée à la linguistique, ne paraît guère opérante pour rendre compte de tous les processus à l’œuvre dans la peinture, le mythe a le mérite de faire apparaître une posture particulière et de mettre clairement en avant l’attitude analytique, le refus d’une recherche de l’expressivité.
 
On a pu dire que le “système Viallat”, cette forme identique sans cesse répétée sur toutes sortes de supports et baignant dans des jus colorés toujours différents, naît le jour où le peintre, sollicité pour l’édition d’un tirage de tête, découvre, chez Jacques Lepage, dans la proximité d’Arman, les vertus de l’accumulation et de la répétition. Je n’ai aucun doute sur l’anecdote que je tiens de Jacques Lepage, je n’ai aucun doute non plus sur l’intérêt de Viallat pour la démarche et la réflexion d’Arman, dont il est pourtant, esthétiquement, très éloigné.
 
Mais l’essentiel du travail de Viallat ne réside pas dans la répétition ou l’accumulation de la forme. La répétition est prétexte, elle est facilitation ; on ne peut pas ne pas y faire référence, mais elle est un leurre. Du fait des supports, des matières, des pigments, des couleurs, des types de pigmentation, l’artiste n’a jamais présenté deux fois la même oeuvre... ni la même forme. La répétition d’une forme de dimensions toujours identiques a permis à Viallat de faire fi des problèmes classiques de composition et de format, de les dépasser et de se focaliser sur deux autres faits : la construction, ou la structuration, du support comme espace plastique, et l’exploration systématique de la couleur... 

++++

INTRUSIONS

 “Ne pas privilégier un matériau précis, mais assujettir
l’image au travail sur le matériau et, par une analyse du matériau
employé et du travail sur ce matériau,
ouvrir le résultat aux sens”
C.V.
 
Car Viallat ne peint pas sur de la toile à peindre, de la toile de peintre apprêtée, tendue -ou non- sur châssis. Il peint toute surface souple qui peut recevoir de la couleur... C’est ainsi qu’il a considérablement élargi les espaces possibles de notre sensibilité plastique. Lorsque Picasso, en intégrant un ticket de métro dans une de ses toiles, réalise le premier collage, il fait entrer dans l’espace de la peinture des espaces et des objets utilitaires. Lorsque Duchamp installe un urinoir dans un musée, il procède de la même problématique. C’est cette problématique que Viallat inverse systématiquement dans la constitution de ses supports : en faisant des tissus de récupération, bâches, toiles de tente etc. les supports sur lesquels il peint, il fait entrer la pratique de l’art dans les espaces d’usage social. En outre, la forme est indépendante d’abord de l’espace sur lequel elle se déploie : elles est définie une fois pour toutes comme un fait de l’art et est reconnue comme telle. Répétée, elle s’introduit sur le support. Tout se passe comme si le peintre cherchait chaque fois à voir/montrer/faire apparaître le résultat de la rencontre entre une pratique, une forme et des couleurs perçues comme "arts" ou "peinture", et des espaces issus de / formés par d’autres pratiques sociales.
 
A vrai dire, la rencontre entre ces bouts d’espace et les formes de l’art commence bien avant que la forme et les colorations ne se répandent. Elle commence au moment où l’artiste introduit le tissu récupéré dans l’atelier. Ou, plus précisément, au moment où l’artiste décide de récupérer tel ou tel tissu et de le faire entrer dans l’atelier. Dans ce sens ce geste renouvelle la récupération de l’objet utilitaire de Duchamp, Picasso ou d’Arman, même si le traitement est ensuite différent. Quand Duchamp fait de l’objet utilitaire un objet de l’art en l’installant dans le musée, et Picasso en l’intégrant au tableau, Viallat en fait un possible objet de l’art en le stockant dans l’atelier. Et quand Arman fait de l’accumulation des objets usuels une procédure de l’art, Viallat en fait un préalable. Les tissus sont là, dans l’atelier, en attente de traitement : l’artiste prépare ses munitions.
 
Le processus se poursuit dans d’humbles routines. Il y a, dans la démarche de Viallat, un dispositif modeste, un emploi du temps de travailleur, ouvrier ou paysan, qui se rend chaque jour sur son lieu de travail et se met d’abord à sa tâche d’assembleur : parmi tous les objets accumulés, il en choisit un, selon les conditions du moment, et, avec des gestes de curieux, de badaud ou de promeneur, il le marie avec tel autre, tente les appariements, compose, lentement, ce qui fera le support de l’œuvre à venir. Ainsi se poursuit, dans l’atelier, le travail de choix ou de désignation, commencé en dehors de l’atelier. Viallat fait ainsi passer le moment de la composition de la phase du traitement plastique d’un support à la phase de constitution du support lui-même. C’est le support, les qualités des matériaux qui le constituent, optiques, plastiques, leur colorations, leurs motifs, qui vont ensuite déterminer non la disposition des formes, toujours identique, mais leur traitement coloré. Ce n’est pas la couleur qui, chez Viallat, vient masquer, souligner ou embellir le support, mais la nature du support constitué qui va définir le choix et la variation des couleurs. 

++++

DÉAMBULATIONS

 “Comment n’être que cheminement incertain, indécis,
ou comment affirmer cette fragilité ?
Placer son travail en brûlot ?
quel impossible rêve !”
C,V,
 
Les déplacements de Viallat dans l’atelier pendant le travail m’intéressent. Il marche, prend, se penche, piétine. L’artiste déambule dans son atelier pour choisir la pièce de tissu sur laquelle il va peindre et/ou autour de laquelle il va constituer le support à peindre. Ce qui détermine le choix initial ? La lumière particulière de l’atelier à ce moment là. Les conversations avant de rentrer dans l’atelier. Les sensations de son corps, peut-être. L’humeur du jour. Il y a, ainsi, dans la démarche de Viallat, une subtile dialectique entre une démarche explicite, lucide, rigoureuse et un abandon aux aléas du temps ; entre une projet d’ensemble entièrement maîtrisé et une pratique ouverte aux écarts et aux ruptures. Je garde, à ce propos, le souvenir de l’une de nos rares discussions . C’était dans le milieu des années 70. Je donnais une conférence sur les démarches de la peinture analytique et critique, dont le groupe Support Surface était déjà le représentant le plus connu. Viallat était présent. Nous avons poursuivi la conférence par une discussion entre nous. Il revenait sur la "théorie" que j’avais exposée : la déconstruction de la peinture, la "libération" de la toile. L’exploration de la toile "libre" qui induisait un nouveau type de "libération" des formes, plus intéressée par la réalité du support que par la liberté des gestes ou des pulsions ; l’attention à la matérialité de la peinture et des faits et gestes pratiques qui la constituent. "Bien sûr, disait en substance Viallat, bien sûr, la théorie. Elle est importante et nous en avons besoin. Mais nous devons l’oublier pour peindre." Se donner des règles et discourir sur l’art pour peindre. Mais peindre, faire naître la peinture, là où, justement, le discours tout fait, reçu ou construit, devient inopérant.
 
“Envisager la peinture comme une topologie”
C.V.
 
Les déplacements de Viallat dans l’atelier m’intéressent parce qu’ils me semblent reproduire, ou prolonger, les déplacements en dehors de l’atelier. Promeneur qui ramène vers le dedans, dans le lieu du travail, ce qu’il a glané dans le dehors, tissus et objets, conversations, vibrations, rêveries, peut-être.
Les déplacements dans l’atelier sont ceux du choix, en cela ils m’intéressent. Ils se prolongent dans les déplacements du travail de la pièce, dans cette sorte de chorégraphie au terme de laquelle une nouvelle pièce, une nouvelle œuvre, sera constituée. Viallat travaille ses pièces au sol. Les travaillant à plat, il s’inscrit dans une modernité qui se reconnait, par exemple, dans Pollock. Il les travaille à plat au sol, et ce travail n’a pas d’abord pour objectif de recouvrir de couleur une toile posée à plat. Il est d’abord de réunir des bouts, de constituer un espace au sol, de le construire et de le délimiter, de l’abouter, d’en assembler les bouts par collage avant de les assembler par le travail de la coloration. Pour le coup, les déplacements dans l’atelier, sur, autour et dans l’œuvre en train de se faire, doivent moins aux traditions de l’art occidental qu’à celles de l’arpentage ou du jardinage : attentive préparation pour la mise en culture d’un lopin, ou la structuration, mouvante, toujours à refaire, d’un jardin sec, ou d’un mandala de sable. Et cela aussi m’intéresse : cette poursuite de l’oeuvre dans l’espace et le temps, hors de l’atelier, dans l’atelier et dans la toile, cette continuité entre les dehors et les dedans. Reste que Viallat travaille en construisant physiquement, de tout son corps mouvant et marchant, se penchant et piétinant, l’espace plastique qu’il va donner à voir. L’espace symbolique qu’il va donner à vivre, sentir et penser.

++++

DIALOGUES

 “Ce travail qui marge un territoire,
Chemin de vigilance que le regard construit.”
C.V.
 
Lorsqu’il investit les tissus, qu’il met en place sa problématique, produit une pièce particulière, expose, Claude Viallat dialogue dans un contact permanent avec les peintres, il s’entretient avec eux, pour les contredire ou les prolonger, pour s’opposer ou pour ajouter à leur propos, le nuancer, l’amplifier, donner sa voix. Voilà qui peut se dire pour la plupart des artistes. Ce qui est particulier dans le cas de Viallat, c’est le nombre et la diversité des artistes avec lesquels sa peinture s’entretient, la clarté de son propos, de ses engagements, de ses rejets, la netteté de ses apports. Faisons court : parmi les artistes contre lesquels il dresse son travail, ceux de l’école de Paris, dont il refuse le lyrisme, ceux du nouveau réalisme, en ce qu’ils ne traitent pas de front les problèmes de la peinture avec les moyens de la peinture ; dès ses débuts, en revanche, il s’approche de l’abstraction américaine, s’interroge sur Pollock ou Newman, tire des leçons du travail d’Hantaï, discute avec Parmentier : intérêt pour la picturalité, attention aux matières, aux supports. Tout cela est bien connu dans l’œuvre de Viallat. Connue aussi son attention à Picasso ou à Matisse. Il faut rentrer dans l’œuvre pour mesurer combien est profond et quotidien ce dialogue. Avec Matisse, par exemple, dont les échos passent si souvent dans le travail et les propos de Viallat, que l’on pense à cette “Vague” matissienne dont la forme se répercute peut-être dans la “forme Viallat”’ ou cette “Nature morte aux aubergines” de 1911, dont on retrouve, comme pour d’autres œuvres de Matisse, les couleurs et leur organisation dans telle œuvre de Viallat. Et comment ne pas penser, en parcourant l’oeuvre de cet artiste d’aujourd’hui à la longue tradition des coloristes occidentaux ? Comment ne pas se retrouver en dialogue avec Bonnard, ou Turner, ou Constable, ou le Tintoret, et toute l’école vénitienne ? Toute une “interplasticité” est à l’œuvre au quotidien dans le travail de Viallat.
On s’en doutera. Le dialogue déborde le seul domaine des arts. On parle souvent du primitivisme de Viallat, parce qu’il intègre, dans son travail des objets, des pratiques, des préoccupations millénaires. Filets ou nœuds devenus “œuvres d’art”, cercles (le chassis premier : une branche sur elle même revenue en cercle, nouée et sur laquelle on tend une peau), arcs, galets dont les empreintes rappellent le mésolithique, sans parler des images venues de la tauromachie : toute une panoplie de formes et d’objets repris aux artisanats et pratiques ancestrales. Pourtant je retiens moins de cette attitude son primitivisme, qui me paraît un effet et non un objectif, que la volonté de faire surgir la démarche de l’art de toutes les démarches humaines, présentes ou passées et de s’intéresser à tout ce qui, dans les pratiques sociales, peut être digne du regard. Dans la démarche de Viallat, on retrouve ainsi les préoccupations des ethnologues, sociologues et historiens de notre époque qui, tout en prenant en compte les grands événements et les grands faits, ont attiré l’attention sur les microstructures, la vie quotidienne, la gestuelle, les savoir-faire ou les mentalités.
Lorsque j’ai vu, pour la première fois, les nœuds de Viallat (en 1972, à Paris, au grand palais), c’est bien cette préoccupation qui m’a sauté aux yeux, cette attention, nouvelle dans l’art, portée par un artiste, avec une visée d’artiste, sur des techniques que l’on percevait comme purement utilitaires. Les nœuds de Viallat faisaient alors échos aux techniques d’assemblage systématiquement étudiées par Pagès, aux découpes et châssis japonais de Charvolen, aux mouches de pêche de Dolla ou à l’intérêt de Miguel pour les matériaux du bâtiment. L’art ne se bornait pas à contempler le monde, il allait chercher dans les pratiques sociales ses motifs, ses objets, ses raisons... Son origine ? 
 

++++

PARADOXA

 “La signification n’est plus le déchiffrage d’une
“production”, mais le déséquilibre d’un système”
C.V.
 
Dans une étude de 1977, parue en français dans le numéro de septembre 1989 de la revue Poétique sous le titre “Pièce” contre l’esthétique, Timothy Binckley oppose la notion de “Pièce”, dont il fixe l’origine à Duchamp, à la notion d’”œuvre”, dénomination traditionnelle du résultat du travail artistique. La “Pièce” s’oppose à l’œuvre en ce sens qu’il convient, pour en rendre compte, de se référer non à ses effets esthétiques, mais à ses processus de fabrication. En ce sens, la démarche de Viallat, ancrée dans les problématiques des avant-gardes des années 60, relève de cette approche. Pourtant, elle ne m’y semble pas réductible tant le travail de l’artiste propose des objets dont les effets perceptifs relèvent bien de l’esthétique. Le résultat du travail peut être saisi et apprécié en dehors de toute explicitation de la démarche. Pour qui connaît la démarche et les attendus de Viallat, ses déclarations et ses présupposés, l’approche esthétique de ses travaux peut poser problème : il pourrait voir en effet une contradiction entre les objectifs initiaux déclarés et les résultats artistiques affichés.
Une réflexion de Kendall Watton peut nous aider à sortir de cette contradiction. Au détour d’un article de 1970, traduit dans la revue Poétique d’avril 1991 sous le titre Catégories de l’art, Watton précise : “la façon correcte de bien voir une œuvre est probablement celle qui nous permet de la voir sous son meilleur jour”. Plus loin, il ajoute que certaines œuvres permettent une multiplicité de manières de les percevoir (i.e. entrent dans plusieurs catégories).
C’est ainsi qu’il faut approcher le travail de Viallat : toujours pleinement inscrit dans la démarche analytique et critique qu’il explicitait clairement et fortement dès les années 60, aussi pleinement inscrit dans une démarche d’élargissement des références, objets et pratiques artistiques, et tout aussi pleinement dans la tradition coloriste de l’art occidental. Œuvre multiple aux approches multiples et subtilement articulées, en cela l’œuvre de Viallat est grande.

++++

FINALE

“Le pinceau glisse sur la toile
la couleur s’ancre dans le tissu
et diffuse épaisseur et fluidité
les formes se mettent en place
et l’espace s’accommode
regard tenu en respect par la réalité
qui se constitue à mesure
que la surface s’organise”
C.V.
 
 
Parfois la faille n’est pas seulement en bordure de pièce, mais dans la pièce même.
 
Vous êtes entré et une "nature" vous a été donnée. Vous avez glissé ailleurs.
 
Vous avez déjà connu ça : avant que les fiches des botanistes, des géologues, des géographes, des astronomes ne viennent baliser l’espace dans lequel vous flottiez. Ou quand vous avez été baigné par des lumières colorées dans le bourdonnement des ruches ou des orgues. Quand vous avez entendu les ruissellements des bruits et des eaux dans les jardins, les cloitres ou les mosquées. Quand vous avez franchi le seuil des paradis.
 
“Pots de couleur et de peinture
Promesse contenue d’infinies jouissances,
de jouissances potentielles.
Le geste de saisir dérange et mobilise,
tout s’enclenche et se noue.
Rien dans le mutisme immobile
ne préfigure le résultat.
La décision viendra du détour de la main.” 
C.V.

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